Comment se faire connaître en tant que thérapeute – Interview

J’ai interviewé Jean François Richard, art thérapeute analyste, pour avoir son témoignage sur la manière de se faire connaitre en tant que thérapeute, et savoir comment il a développé sa clientèle.

Je m’appelle Jean-François Richard et j’exerce en tant qu’art-thérapeute analyste depuis 2010, à Saint-Martin la Plaine dans la Loire où j’ai créé l’Atelier Coloressence. J’interviens auprès des enfants, des adolescents, des adultes et des personnes âgées.

 

Qu’est ce qui a motivé ton choix du métier de thérapeute ?

D’abord j’ai fait des études aux Beaux-Arts, mais je ne vivais pas de mon art. Donc, en plus de mon métier d’artiste, j’étais intervenant en arts plastiques dans les écoles et les centres sociaux. Et de fil en aiguille je suis devenu animateur vacataire en centre de loisirs.

Cela m’a plu, je me suis formé et j’ai reçu le diplôme d’état d’animateur. Progressivement, à travers le quotidien des activités que je mettais en place autour de l’art, je me suis rendu compte que je pouvais aller plus loin et entrer dans une démarche plus approfondie.

J’ai alors cherché ce qui pouvait m’aider dans ce sens-là, et j’ai découvert l’art-thérapie que je ne connaissais pas. J’ai fait une première formation, puis une formation d’art thérapeute analyste.

Ma pratique méditative a également contribué à ma motivation de devenir thérapeute car la dimension thérapeutique est complémentaire à l’approche méditative.

 

Quand tu étais animateur, qu’est ce qui t’a conduit à l’art-thérapie ?

Je me suis dirigé vers la relation d’aide parce que j’étais frustré par le groupe. Souvent, les enfants exprimaient des choses et j’étais frustré par le fait que c’était toujours du groupe et qu’il n’y avait pas de prise en charge individuelle.

À travers ces ateliers artistiques, on effleurait des problèmes et on ne pouvait pas aller bien loin alors que cela aurait mérité une structure différente.

Petit à petit, cela m’a ouvert les yeux, d’autant plus que je travaillais avec des éducateurs qui eux, avaient la liberté de pratiquer en individuel. C’est pour cela que j’ai glissé vers l’art-thérapie, parce que c’est vraiment l’aspect thérapeutique qui m’intéresse.

La relation d’éducateur est plus tournée vers l’aspect éducatif. Pour moi, l’art-thérapie touche la dimension psychologique, ce qui me semble essentiel pour favoriser l’évolution des personnes. Cette approche permet aussi d’appréhender des questions plus essentielles sur le sens de l’existence.

 

Comment as-tu débuté dans ce métier ?

Dès que j’ai commencé ma formation par l’intermédiaire du Centre social, j’ai animé des ateliers d’art-thérapie. Avec un public d’enfants et d’adultes en insertion, on faisait des petits groupes et on travaillait dans le domaine de l’expression à travers la dimension artistique.

 

Comment es-tu passé d’un statut de salarié à mi-temps au statut d’entrepreneur à plein temps ?

J’ai trouvé que le Centre social ne me permettait pas de développer totalement l’art-thérapie analytique comme je le souhaitais. Et j’avais envie d’être indépendant.

Par contre, comme je suis quelqu’un d’anxieux, je ne voulais pas mettre en difficulté ma famille. J’ai donc cherché une formule qui me permettait de partir vers l’aventure de l’entreprenariat, mais sans mettre trop en danger mon environnement familial. J’ai demandé à travailler 20 heures et j’ai commencé à développer l’art-thérapie en louant une salle bon marché dans ma région.

Deux ans plus tard s’est posé la question de trouver un lieu qui serait le mien. Car louer une salle impose d’emmener le matériel, et c’est impersonnel.

Je me suis renseigné ensuite pour avoir un lieu qui me correspondait plus. Mais la location des salles coûtait entre 400 et 500 €. Je me suis très vite dit : « Vu que chez moi, j’ai une vieille grange, autant investir chez moi. J’ai fait le calcul. 400 € par mois faisaient 5000 euros par an. Sur 10 ans, j’arrivais à un total de 50 000 €.

C’était donc préférable que j’investisse dans la réfection de ma vieille grange pour avoir mon lieu à moi, même s’il n’est pas très grand.

J’avais certains freins parce que c’est chez moi, donc les gens viennent pénètrent un peu dans mon intimité, mais j’ai décidé de l’accepter.

J’avais d’autres freins. Mon habitation est loin des transports en commun si bien qu’elle est accessible uniquement aux clients qui sont véhiculés. Mais j’ai préféré choisir cette option. J’ai fait mes travaux. Et quand je les ai finis, j’ai demandé à travailler seulement 15 heures au Centre social.

J’ai travaillé de cette façon pendant plusieurs années, puis j’ai négocié un contrat de 12 heures. Je suis parti définitivement du Centre social en 2016, et depuis, je suis entièrement à mon compte.

 

Comment as-tu fait pour être connu ?

Jean François Richard, art thérapeute à Saint Martin la PlaineJ’ai bénéficié de mon réseau du Centre social. Ce qui fait que pendant les premières années, avant d’avoir une clientèle privée, j’ai beaucoup œuvré dans les dispositifs d’aide à l’enfance comme l’organisation de réussite éducative de Rive de Gier et une maison de retraite de ma région. J’ai travaillé pour la Mission locale, et j’ai donc bénéficié de missions institutionnelles. J’ai animé aussi un café des parents pour le Centre social.

C’était intéressant parce que cela me donnait une visibilité financière avec des contrats annuels.

Ce qui a été difficile avec les institutions, c’est leur cadre très précis, et ce n’était pas évident de se positionner : est-on est dans le champ de l’animation ? Est-on dans le champ de la psychologie ? Entre les deux ?
Des problèmes de positionnement existaient. Pour moi c’était un peu difficile.

Je me suis fait un site Internet et des publicités moi-même, j’ai mis des flyers dans les lieux pertinents : les magasins bio, la médiathèque, quelques professionnels de santé.

Je n’ai pas trouvé beaucoup de prescripteurs au début. L’évolution s’est opérée graduellement. J’animais deux ateliers en dehors de mes contrats avec les institutions. Et les ateliers se sont développés.

 

Avec la pratique, tout s’arrange

Au début, mes premières analyses étaient un peu difficiles pour moi. Je sortais de formation et je n’étais pas forcément très à l’aise en tant que débutant. Parce que c’est une méthode un peu particulière avec une interprétation de l’inconscient et une part de subjectivité. C’était un peu anxiogène car je ne voulais pas influencer d’une manière négative et j’avais peur de me tromper.

Donc je préparais beaucoup à l’avance et je me renseignais énormément sur les symboles afin de bien les maîtriser.

Mais le fait de répéter des expériences, avec la pratique, j’ai acquis plus de facilité.
Les personnes avec qui j’ai commencé étaient des gens je connaissais, ce qui était facilitant.

Tu ne crains pas de ne pas paraître lisse ?

Non, je n’ai pas peur. Je ne cache pas que j’ai un fond anxieux. Cela ne sert à rien de le dissimuler. D’ailleurs, la manière dont j’ai monté mon business montre bien que j’ai cherché la sécurité.

 

La question des tarifs

D’autre part, quand j’ai commencé, j’avais des tarifs très bas. Je faisais payer 17 € l’heure de consultation. Et 45 € le mois de huit heures de peinture.

Très rapidement, des amis thérapeutes m’ont alerté. Ma comptable m’a appelé pour me dire : « Jean-François, si vous continuez comme ça, vous ne tiendrez pas. Il va falloir augmenter vos tarifs.

Donc je les ai augmentés. Idem quand j’ai dû payer la TVA.

Par ailleurs, le tarif que tu te fixes au début est lié d’une certaine manière, à la valeur que tu te donnes. Tu as envie que les gens viennent te voir et d’être accessible. Mais souvent, si tes tarifs sont bas, c’est une manière de signifier que tu ne donnes pas beaucoup de valeur à ton travail.

 

Quels sont les conseils que tu donnerais à un thérapeute qui veut se lancer ?

Premièrement quand on veut se lancer, il faut bien définir ce qu’on veut et ou l’on veut aller. Quand on devient thérapeute ce n’est pas pour rien : une dimension d’aide est importante, de relation, mais aussi une dimension business. Notre activité doit nous permettre de vivre à 100%.

Donc il faut bien définir le statut qu’on souhaite : être salarié ou en entreprise individuelle par exemple. L’avantage du salariat, c’est la sécurité. Quand tu es à ton compte, c’est le taux de remplissage de ta clientèle qui fait ton salaire. De plus, la comptabilité en profession libérale n’est pas du tout la même qu’en tant que salarié. Il faut bien maîtriser toutes ces questions. Donc il faut prendre un comptable rapidement et avoir une structure qui te libère de toutes ces questions-là.

Il faut savoir dans quel cadre tu veux travailler pour préserver l’équilibre avec ta famille, c’est très important.

Une fois que tu as décidé ce que tu veux, tu n’as plus qu’à le décliner en moyens :

  1. comment tu vas faire pour arriver à ton objectif,
  2. quel espace tu veux pour ton cabinet,
  3. quels outils et quel matériel, la logistique,
  4. quelle amplitude horaire.

Cela dépend aussi de ta famille. Il faut en discuter avec ta famille, car je vois des gens qui lancent leur activité et qui se retrouve en conflit avec leur milieu familial. C’est une raison facile pour échouer.

Pour finir, je dirai que mon métier demande de s’adapter à l’emploi du temps des clients qui travaillent. Tu peux les recevoir entre midi et deux après le travail ou bien le soir après 18 heures ou le matin de bonne heure.

Aujourd’hui, je sais que je finis rarement avant neuf heures voire 10 heures. Si tu es chez toi, ce n’est un problème, dans le cas contraire, tu dois regrouper les rendez-vous. Si ton cabinet à Pétaouchnoque, c’est beaucoup plus difficile de s’organiser. Il faut bien réfléchir à tout cela.

Voir le site web que j’ai créé pour l’Atelier Coloressence

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2 Commentaires

  1. binde

    MERCI
    et comment trouver le comptable pro pour ce domaine ?
    Y a t il une piste en particulier ?

    Réponse
    • Elisa Morgand

      Les comptables savent très bien comment gérer une entreprise pour qu’elle soit viable. N’importe quel comptable peut vous conseiller efficacement. Si vous voulez des pistes sur leur professionnalisme, vous pouvez regarder les avis sur Google. C’est un bon critère de choix.

      Réponse

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